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Equilibre

Pesant chaque lettre pour pouvoir te décrire
équilibre
j'ose à peine respirer de peur de t'effleurer


Et pourtant
ne surtout pas te tenir
au risque de m'engonsser dans le poids d'une pause

Mais te laisser couler
en des formes inconnues
dont je ne reconnais rien que des chocs et des choses  

Là plus rien ne tient plus
que par le souvenir d'un état tellement pur
qu'à peine né il défaille

De mon sol titubant te voir soûl de confiance
entre tes plateaux fous 

M'envoyant tout valser dans l'immense insensé
de ces mille forces dures

Et puis de revenir
papillon léger

Me déposer soudain sur la pointe d'un pied
Dans ton cloître parfait

Sûrement pas par magie
mais par le processus d'une savante alchimie
dont j'ignore absolument tout

 

Cathy De Plée - août 2022 

 

 

 

 

Cette même robe rouge


Vous sortez chaque année cette même robe rouge
toutes jumelles
dans le frou-frou ombré de votre lit de feuilles

Demoiselles
délicatement tissées à cette frondaison
où seul le vent vous bouge
parmi quelques bourdons

Vous traversez l'été
en dentelles
aussi légères qu'un bouquet de papillons

Mais cette robe rouge
qui attrappe mon oeil
sans jamais le fâner de maisons en saisons
est-elle chaque fois nouvelle ?

Ou est-ce toujours la même qui refleurit sans cesse
camouflant son grand âge sous les traits effrontés
de la tendre jeunesse ?  


Cathy De Plée - juillet 2022

un modeste monde


c'est un modeste monde minusculement niché
dans un lieu un peu vieux aux tentures trop sombres
aux parquets ébréchés et où plus rien ne tient

c'est une journée lente qui ne fait que passer
un dimanche allongé ni triste ni gai
où chevrote en sourdine le piano voisin 

c'est une pierre quelconque que l'on pose à côté
d'une longue suite d'autres pas plus distinguées 
et ne signifiant rien que le travail d'une main  

c'est l'élan qui s'arrête pour mieux se concentrer  
l'obsession du lointain qui retrouve ses pieds
la fierté de marcher à pas de nain 
 

 
Cathy De Plée - juin 2022 

Ciel rosé

Ciel rosé étire son rouge enflammé
La fenêtre d'en face a des yeux de télé
Ciel passionné de ses propres couleurs
S'ennivre à l'horizon en sueur

Ciel rosé pointé de jaunes et de gris
Doucement s'évaporent les soupirs de la nuit
Ciel interdit voudrait bien oublier l'heure
Qui l'enlèvera à sa trouble torpeur
 
Ciel rosé finalement s'assagit  
Dans la rue résonnent les premiers bruits
Ciel de champagne vire à l'argenté
Allume le jour de son blanc lacté.

 

Cathy De Plée - mai 2022


 

 

 

 

 

 




Choix ultime

A choisir
Je préfère qu'on m'enterre
Mais pas trop profond

Que mes os
Purifiés par la terre
Aient l'écho du jour

Dessus moi
Un bel arbre sera l'oeil
Du grand horizon

Et mon âme
Voletant tout autour
Se mêlera aux oiseaux
 
 
Cathy De Plée - mars 2022 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 
 

Tenir

tenir
comme un cavalier s'accroche à sa selle
sur un cheval fou

tenir
parce que c'est moins qu'agir
mais plus que subir

tenir
entre les roses
tenir
entre les vents

tenir
bien fort ta main
et resentir son pouls

tenir
encore debout
parce que c'est déjà ça

tenir
comme s'il n'y avait pas d'autre choix

 

Cathy De Plée - janvier 2022

 

Ses bras

Ses bras étendus sont ma protection
Un rempart solide de deux millénaires
Droit comme l'arbre larges de lumière
Ils stoppent l'intru au seuil de ma maison

D'aucuns raillent cette ardente position
Soit disant destinée aux pires raclures
Elle montre au contraire toute l'envergure
De la force qu'elle incarne sa compassion


Et pourtant ils coulent sur tant de peintures
Ces bras fourbus ensanglantés ou tors
Mais les plus belles les ont fait lisses et forts
Barrant la route à toutes les conjectures

Ils ne sont pas l'aube de toutes nos misères
Ni l'écorche inaugurale de nos corps   
Ces bras ont porté Jésus à son Père
Et m'escorteront tel un bouclier d'or

 

Cathy De Plée - janvier 2022